Egypte : la nouvelle donne entre Afrique et Moyen-Orient


Il aura fallu attendre une semaine pour que soient enfin publiés les résultats des élections égyptiennes qui placent le candidat des Frères musulmans, Mohamed Morsi, en tête avec plus de 51 % des voix. On a du mal à croire à une difficulté de comptage des voix, les résultats ne sont pas si serrés. En revanche, le discours inaugural du nouveau chef d'Etat, dans lequel il affirmait que "tous les traités internationaux seraient respectés", nous éclaire un peu sur la teneur probable des négociations qui ont précédé la publication officielle des résultats.
Toute la frontière Est de l'Egypte est commune avec Israël ; c'est dire si le monde a tremblé à l'idée que Mohamed Morsi remette en question le traité de paix liant les deux pays, comme il l'annonçait dans sa campagne. 
L'Armée égyptienne n'appréciait pas non plus : elle reçoit chaque année une aide substancielle des Etats-Unis pour que les clauses de ce traité soient respectées. D'ailleurs, elle a déjà confisqué une bonne part des pouvoirs présidentiels dans l'entre-deux tours des élections.

Toujours est-il que dès aujourd'hui, Mohamed Morsi a réaffirmé son engagement de "créer un équilibre stratégique dans la région" en renforçant les relations entre l'Iran et l'Egypte. 
La veille, l'Iran déclarait de son côté, que les événements de Tunisie et d'Egypte étaient le signe d'un "réveil islamique" dans la région. On n'a pas fini de constater les effets géopolitique des printemps arabes : partout où les dictateurs chutent, les islamistes s'imposent : ils sont souvent la seule force d'opposition constituée et opérationnelle.

Cette victoire n'est  pas seulement idéologique, elle est de plus en plus territoriale : depuis le Moyen-Orient, l'Egypte est la porte d'entrée en Afrique, juste au dessus de la bande sahélienne. On ne peut pas ne pas regarder la victoire des Frères musulmans en Egypte sans jeter un œil du côté du Maghreb mais aussi du Mali et de toute la région sahélienne…
On voit alors s'unifier physiquement le bloc géopolitique visé par le Djihad : toute la rive sud de la Méditerranée, d'abord ; la région sahélienne ensuite. On peut même voir se dessiner dans le rapprochement entre sunnites égyptiens et chiites iranien, la possibilité d'un apaisement des schismes…

Après plusieurs siècles au cours desquels l'Islam était méprisé, on ne peut pas s'étonner qu'il prenne la place laissée vacante par la chute des anciens héros de l'indépendance. 1400 ans, ce n'est pas si vieux pour une religion et l'Islam, plein de vigueur, rêve d'une nouvelle apogée. 
Cette fois encore, hélas !, il est à craindre qu'il faille en passer par quelques dérives inquisitoriales de la pire espèce : hier, deux hommes ont été condamnés à mort en Iran pour avoir consommé de l'alcool. Quand à la guerre des Croisés, elle est en marche et le but symbolique ne change pas : Jerusalem, la ville charnière. 
L'intransigeance israélienne n'aide guère à l'apaisement. L'islam radical s'en nourrit.

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